« Oh la la, tu parles quand même beaucoup de ton corps malade ». « Ah, tu as aussi ça qui te va pas ! » « Mais y a rien qui va dans ton corps, oh oh oh », « Oh ça va, tu n’es pas non plus handicapée ». « Ben te plaint pas, tes maladies au moins elles ne se voient pas ». Ou les pires ; « Vous êtes jeunes donc vous avez la santé, mademoiselle », « Non mais, elle exagère, y a rien de grave ». « Vous avez si mal que ça ? »
Ben non connard. J’invente, moi j’adore ça, inventer des trucs. Ouais c’est vrai, ça me ferait pas super plaisir d’avoir un corps en bonne santé. C’est vrai que j’adore rester des heures dans un hôpital en attendant mon tour pour rentrer dans un tube qui teste bien ma claustrophobie. J’adore ne pas pouvoir faire de la course à pieds, ne pas pouvoir faire de l’équitation, ne pas pouvoir faire de manèges à sensations, ne rien pouvoir faire sans peut-être finir alitée pendant des semaines. J’adore ne pas pouvoir porter mes sacs de courses. J’adore que l’on me prenne pour une jeunette, ouais, mais j’adore surtout que l’on me rappelle bien que je devrais avoir la santé. J’adore ouvrir mon agenda et voir 40 milles RDV chez différents médecins, et changer toujours parce qu’ils ne trouvent jamais pourquoi j’ai mal. J’adore prendre mes vacances en fonction de la non-présence des RDV médicaux.
Alors, c’est vrai, je suis pas en train de mourir. C’est vrai, je ne suis pas à l’hôpital toujours. C’est vrai, j’ai ma semi liberté. Je n’ai jamais dit le contraire en fait. Juste laisse-moi m’exprimer comme je l’entends quand je parle de mon corps qui est, oui, malade, oui, souffrant, oui, fatigué.
Ta gueule, connard.